Manufacture d'orgues Th. Kuhn SA, 1998
Orgue neuf
www.orgelbau.ch/opf=113760
III/P/29
Allemagne, Schleswig-Holstein
Kath. Kirche Herz Jesu
Aspect architectural
La paroi orientale de la grande nef présente deux grandes ouvertures, l'une donnant en bas par un portail d'accès au narthex, l'autre en haut, de forme ogivale, s'ouvrant sur la tour. Cette ouverture supérieure représentait l'endroit idéal pour placer un orgue important, avec des avantages sur le plan esthétique et acoustique. La construction entre ces ouvertures était trop faible pour supporter le poids d'un grand orgue, raison pour laquelle on n'avait jamais osé le construire à cet emplacement. Les instruments précédents ont toujours été enfermés dans l'espace de la tour, ce qui naturellement réduisait considérablement leur effet sonore.
Grâce à une construction d'acier, des problèmes de résistance ont été résolus, et le tablier actuel a permis d'accueillir l'essentiel des éléments de l'orgue neuf, à l'avant et sous la voûte. Comme il n'était pas possible de loger les quatre claviers (Grand-Orgue, Solo, Récit expressif et Pédale) dans une largeur ne dépassant pas six mètres, ces plans sonores s'échelonnent vers l'arrière. De plus, nous n'avons pas voulu masquer avec des éléments de l'orgue toute l'ouverture de l'ogive pour que la lumière provenant de l'arrière, de la tour, puisse transparaître.
Avec toutes ces données, nous nous sommes finalement orientés vers la disposition suivante pour les claviers: le Grand-Orgue se situe au dessus de la console, avec une tuyauterie de 8'. Le centre de l'orgue a été mis en valeur par des tourelles en tiers-point, contenues et soulignées par les tuyaux de 16' de la Pédale, les plus grands tuyaux de l'orgue qui dépassent cinq mètres! A l'arrière du Grand-Orgue, à sa même hauteur et dans la percée du mur oriental, nous avons placé le Solo, puis dans le volume de la tour, le Récit expressif.
Ces claviers de l'orgue disposés en retrait ne sont pas visibles depuis la nef, mais, pour ne pas désavantager leur émission sonore, ils ont été construits dans un même ensemble. Ceci pouvait permettre de recevoir dans la nef un équilibre et une présence normale des différents plans sonores, qu'ils soient placés à l'avant ou à l'arrière de la voûte.
Les plates-faces du Grand-Orgue, de construction étagée, suivent la courbe de l'ogive de la nef centrale. Les grandes tourelles de Pédale amènent un contre mouvement vers l'arc, avec un alignement des bouches suivant la courbe du portail.
Le buffet voulu en chêne clair et traité à l'huile, avec une façade riche en tuyauterie, a été conçu pour s'intégrer dans les colonnades, dans les cintres de la voûte.
Conception sonore
A première vue, la grandeur de l'instrument, avec ses 29 jeux, ne devrait pas permettre une grande ouverture sur le répertoire symphonique. Cependant, la répartition de ses jeux sur trois claviers et pédalier, avec une utilisation possible et variée des différents plans sonores, peut faire dire le contraire! L'idée première était de séparer les jeux du Grand-Orgue (I) avec l'adjonction d'un clavier de Solo (II). Ainsi, il en résulte qu'avec son accouplement, le Grand-Orgue a son complément nécessaire et que la registration peut s'enrichir pour la polyphonie, le solo. Le Récit expressif (III) n'a pas qu'une attribution pour la musique romantique; grâce à sa présence sonore dans la nef, il peut s'utiliser au clavier pour un trio, pour compléter la Pédale dans un cantus firmus.
Les anches ont été traitées de façons très contrastées. Alors que les anches du Grand-Orgue et de la Pédale sont plutôt d'esthétique allemande, celles du Solo et du Récit penchent vers la tradition des anches classiques françaises.
Dans cette conception sonore, les accouplements ont un rôle particulièrement important à jouer. Le mélange et la fusion des jeux de fond doivent pouvoir se faire dans toutes les registrations possibles, sans fluctuation de l'accord. A côté des six accouplements normaux, il existe un accouplement du III/I en 16'. Ceci permet de donner au Récit une dynamique pratiquement sans faille, non seulement dans le Forte, mais aussi dans les nuances Piano, avec la douceur des flûtes, la coloration de leur fusion avec les gambes.
Une mécanique pure pour la traction et le tirage peut paraître restrictive pour le répertoire romantique. Cependant, avec l'aide de cinq tirasses mécaniques réversibles pour chaque jeu d'anches et la Mixture du G-O, une répartition des jeux sur trois claviers, la registration réclamée pour l'écriture musicale des 19 et 20ème siècles est bien réalisable.